Nihil Nove

28 février 2006

The patriotisme économique

Ai-je besoin de dire que je suis contre le projet de fusion de Suez avec GDF? (Reuters)

Je ne sais pas si, comme le déclarait Valéry Giscard d'Estaing avant de perdre les élections présidentielles de 1981, les Français veulent être gouvernés au centre, mais les hommes politiques français aiment certainement le juste milieu. En France, une idée qui semble être entre les deux idées de droite et de gauche est toujours bonne, même si elle est mauvaise.

Retraite par capitalisation ou par répartition? Mon cher, il faut renforcer notre système par répartition avec de la capitalisation. Les deux dans la même assiette, avec une feuille de salade et un quart de tomate sur le côté pour faire joli. Et le reste à l'avenant.

Non, c'est une mauvaise idée. Le Gouvernement doit se trouver bien malin d'avoir ainsi un expédient pour privatiser GDF sans casse, mais encore une fois il ne comprend pas, ou feint de ne pas comprendre, que la mondialisation marche dans les deux sens! Si les étrangers viennent acheter chez nous, ça veut dire qu'on peut acheter chez les étrangers! En tout les cas, c'est ce qui se passe si on accepte les règles du jeu. Sinon, on reste dans son coin en se sclérosant lentement, de croissance qui s'anémie en taux de chômage qui se solidifie.

Il faut l'expliquer aux Français (et le rôle des médias ici n'est pas innocent, j'y reviendrai certainement), mais il faut surtout agir! Pour un Gouvernement qui parle tant d'action, il en fait peu!

Les primaires, en fait, c'est primaire...

Ceci confirme cela.

27 février 2006

Chapeau, Silvio

Il semble que le monde entier s'est moqué du dernier « dérapage » du premier ministre italien Silvio Berlusconi. En effet il a déclaré récemment: « Je suis le Jésus-Christ de la politique. Je suis une victime patiente. Je supporte tout. Je me sacrifie pour tout le monde. »

Rien qu'ça.

Je comprends qu'on rigole. Toutefois, avant de se gausser, peut être faudrait-il remarquer que ce propos si cocasse est tombé le même jour où l'Union, la fragile alliance de gauche que dirige Romano Prodi, candidat au poste de M. Berlusconi, publiait son programme de gouvernement.

Cet évènement fut tout simplement balayé dans les médias par la petite remarque de M. Berlusconi. Remarquez, ce n'est pas bien difficile à comprendre étant donné la texture assez pâteuse de l'ouvrage, qui chiffre quand même à 379 pages. Ceux qui ont essayé de s'attaquer aux motions du Parti socialiste, mélange de pâte molle à l'étouffe-chrétien et de ganache de bonnes intentions enrichie au glucose, me comprendront sans peine.

En effet l'Union de M. Prodi comporte sept différents partis allant du trotskisme à la démocratie chrétienne, de l'extrême gauche au centre droit, et le programme en question s'en ressent, ammoncellement de mesurettes et de compromis plus ou moins vaseux où chacun — sauf les électeurs — doit trouver son compte.

Encore une fois, M. Berlusconi a donné une leçon de politique à la gauche lorsqu'il a voulu établir le programme de son alliance, groupe guère moins hétérogène allant du centre à l'extrême droite: il a tout simplement annoncé huit mesures phares avant même d'avoir consulté ses alliés, qui, malgré des grommellements initiaux, ont bien dû se rallier à son projet.

Jacques Chirac, George W. Bush, Silvio Berlusconi: autant de leaders politiques qui ont été réélus à la surprise générale à force de coups dans ce genre. Plus ça va, plus j'ai l'impression que la clé du succès en politique c'est de faire croire aux autres qu'on est con.

26 février 2006

Les primaires c'est pas primaire

Hier, premier tour des primaires UMP à Paris. Et puis grosse fête avec les militants, car le candidat que je soutiens depuis quelques mois (ce qui explique le hiatus qu'a subi NN depuis quelques semaines), Claude Goasguen, est au second tour.

Il est toutefois loin derrière la candidate favorie des médias, Françoise de Panafieu, qui a 40% contre ses 23. Cette opposition est significatrice, car c'est en réalité une opposition entre deux conceptions de Paris, et surtout deux conceptions de la politique.

L'argument principal de Françoise de Panafieu est son sexe, et elle a clairement un effet Ségolène qui joue en sa faveur. Mais surtout, si on écoute ses propos, on se rend compte que son intention est de faire du Delanoë de droite: elle veut faire sa campagne dans les médias, elle cherche à ramener les bobos à droite, et ses propos sur les actions les plus controversées de la mandature actuelle (tramway, couloirs de bus...) sont loin d'être tranchés.

Je pense qu'avec ce genre d'approche la droite perdra les élections municipales. Pourquoi? Parce que c'est l'exemple de la droite avec laquelle il faut finir: la droite qui court après la gauche. Celle qui a honte d'être la droite, honte d'avoir des idées, et qui donc essaye de faire de la pseudo-gauche bien-pensante et consensuelle. La droite de la fracture sociale et de la croissance sociale, du retrait de l'article 4 mais du maintien des lois Gayssot et Taubira. La droite du mou. La droite qui perd.

La droite gagnera en France en 2007, et à Paris en 2008, en étant audacieuse et populaire.

Audacieuse en renouant avec un vrai projet de rupture avec la politique de centre gauche que tous les gouvernements se sentent obligés d'adopter depuis trente ans, avec les conséquences que l'on sait. Non! N'ayons pas peur d'affirmer nos valeurs! De dire en quoi nous croyons! C'est grâce à ça que Nicolas Sarkozy reste au sommet des sondages malgré les caillassages médiatiques dont il est l'objet.

Populaire parce que l'électorat de la droite ce ne sont pas les nantis, les héritiers, ce sont les classes populaires et les classes moyennes. N'en déplaise à Mme de Panafieu, je préfère la droite cassoulet à la droite caviar. C'est cet électorat populaire, qui ne vote plus ou vote extrême qu'il faut reconquérir, sur le terrain, une voix à la fois, en leur expliquant que, cette fois, on a vraiment changé, que cette fois ils auront raison de nous faire confiance. Ce sera très difficile de le faire parce que nous les avons déjà trahis tant de fois, mais c'est par là qu'il faudra en passer si nous voulons remporter des élections et regagner la confiance du peuple.

Mme de Panafieu, malgré ses vestes en cuir et ses rollers, incarne en fait le conservatisme. Claude Goasguen par contre, en plus que d'avoir un projet (ça aide), incarne surtout la meilleure manière de faire la politique: au peuple, sur le terrain, avec les tripes, pour faire passer une vision, un vrai renouveau, un vrai courage. Au cours de cette campagne où j'ai parlé avec de nouveaux adhérents de l'UMP j'ai découvert un état d'esprit délétère qui me fait très peur: les gens savent que Françoise de Panafieu n'a pas de personnalité, pas de projet. Mais il pensent que comme elle « passe bien » elle aura plus de chance de gagner face à Delanoë. Non! Premièrement ce n'est pas vrai, si on prend les gens pour des cons ils s'en rendent compte. Deuxièmement, à quoi ça sert de faire de la politique si on en a une telle conception! La politique c'est, on se fout de ce qu'on veut faire, on se fout de se mettre derrière une personnalité forte, l'important c'est de gagner en arnaquant les gens?

Si les adhérants UMP de Paris choisissent finalement Claude Goasguen ils enverront un message fort, celui de la rupture et de la modernité, celui de la politique dans ce qu'elle a de plus noble. Ca a été un plaisir et un honneur pour moi de servir Claude Goasguen au cours de cette campagne où j'ai appris ce que c'est que le vrai engagement, et je suis impatient de remettre ça pour deux ans de plus.

10 février 2006

Les caricatures

Cette affaire est affligeante, et à deux titres.

Le premier, c'est que l'on assiste dans ce qu'il est convenu d'appeler « le monde arabo-musulman » à des poussées de haine, d'antisémitisme et de violence qui rappellent la montée du nazisme en Allemagne dans les années 30. Avec une densité de plus en plus inquiétante, se dessine une lame de fond qui, qu'on le regrette ou non, accrédite la théorie du choc des civilisations.

Le second, c'est la molesse de la réponse occidentale à ces provocations. On croit rêver! On se confit les uns dans les autres dans des discussions bateau sur la liberté d'expression. Evidemment qu'il faut défendre la liberté d'expression, et évidemment que cette liberté d'expression a des limites, qui sont déjà clairement indiquées dans la loi. Le noeud du débat ce n'est pas la liberté d'expression, c'est quelle sera notre réponse à des provocations qui, je le répète et je pèse mes mots, rappellent celles de l'Allemagne nazie dans les années 30.

Notre réponse jusqu'à présent, quand des chefs d'État ont proclamé comme objectif la destruction d'Israël, quand des responsables politiques demandent à des gouvernements de juguler leurs médias, a été l'auto-flagellation. Non! Il faut une fermeté sans faille face à la montée de cet islamisme de plus en plus fort, de plus en plus revendicatif, donc de plus en plus dangereux. Souvenons-nous de Munich.

J'en appelle en particulier aux musulmans modérés, dont je comprends parfaitement le déplaisir face à ces caricatures, mais dont la croyance sincère est facteur de paix, à condamner avec le plus de fermeté cette réponse barbare de l'islamisme radical. J'en appelle aux chefs religieux en général à faire leur la maxime de Voltaire, je ne suis pas d'accord avec ce que vous dites mais je défendrai jusqu'à la mort votre droit de le dire. J'en appelle surtout aux pays modernes et démocratiques répondre de la manière la plus implacable à ce totalitarisme naissant, car c'est notre devoir moral et notre intérêt politique.

08 février 2006

Outreau

Au moment où le juge Fabrice Burgaud va être entendu par la commission parlementaire sur l'affaire d'Outreau, je pense qu'il est temps que je m'exprime sur cette affaire, et notamment sur ses conséquences. Quelles propositions faire?

Faut-il supprimer le juge d'instruction? Non. Le système inquisitoire est le bon, car il est une garantie d'équité entre les parties. On a reproché à l'affaire d'Outreau d'être un exemple de la « justice des pauvres », et c'est vrai. Mais justement, l'alternative, le système accusatoire, un système où, si les accusés veulent des contre-expertises et des contre-enquêtes, il faut pouvoir payer des détectives et des experts. Et sinon, tant pis. Il faut que les enquêtes policières soient faites sous la direction d'un juge.

On dit que le juge ne doit pas juger seulement à charge mais également à décharge, mais c'est déjà son rôle. On a entendu dire qu'il faut séparer la fonction d'enquête du juge et celle de décider de la détention, et c'est vrai, mais il existe pour cela le juge des libertés et de la détention. Ce que je veux dire, c'est que notre droit pénal est bon. Alors, pourquoi les abus?

Le problème, c'est que ce bon droit est peu ou mal appliqué. Le juge des libertés est censé être un contrôle des pouvoirs de détention du juge d'instruction, mais comme ils se connaissent, qu'ils occupent à tour de rôle leurs postes respectifs, le juge des libertés va tout autoriser au juge d'instruction sans y regarder de près. Et le reste à l'avenent. Le problème n'est pas juridique, mais humain. Alors, que faire?

Ma solution est notamment de supprimer l'École nationale de la magistrature. On entend souvent parler de la suppression de l'ENA, l'École nationale d'administration, et on lui reproche alors de formater l'esprit de jeunes hommes qui vont accéder aux responsabilités dès leur sortie de l'école et faire toute leur carrière dans des corps où, détachés de la réalité, ils prendront des décisions tout aussi détachées de la situation concrète. Le reproche est d'autant plus valable pour les magistrats que pour les hauts fonctionnaires.

Recrutons les magistrats sur diplômes (maîtrise de droit) et sur concours, à partir de quarante ans. Bachelier à 15 ans, je suis un ennemi farouche et de principe des limites d'âges, quelles qu'elles soient, mais pour la magistrature, elles se comprennent. Le critère principal doit être l'expérience de la vie. Il faut également donner à ces magistrats des conditions de travail beaucoup plus attractives qu'à l'heure actuelle. Ca passe par des salaires élevés, au moins le double de ce qui existe à l'heure actuelle.

Ca passe aussi par de bonnes conditions de travail. Aujourd'hui, les juges sont obligés de faire du travail administratif. Ce n'est pas leur rôle! Dans la plupart des pays, les juges sont des chefs d'équipes, entourés de collaborateurs, chargés de faire le travail administratif, de préparer tout ce qui est préparable, pour qu'il se consacre à la tâche qui est la sienne: juger. En France, ceux qui sont censés jouer ce rôle d'assistance au juge, les greffiers, ne font rien, ou presque: supposés collaborateurs, ils sont en réalité des secrétaires. Et le gros du boulot tombe sur les épaules du juge, ce qui, dans un contexte d'explosion judiciaire, mène à un surmenage inutile et dangereux.

Alors, comment faire? Les greffiers sont paresseux parce que fonctionnaires. Externalisons le greffe! Ce fut le cas pendant très longtemps, et ça marchait bien. Que les greffiers deviennent des professions libérales, et que chaque juge puisse engager un cabinet ou une équipe qu'il juge (justement) la meilleure, pour l'entourer et l'aider à faire son boulot.

Et, enfin, il faut rendre les juges responsables. C'est la quadrature du cercle: l'inamovibilité du juge est une garantie indispensable d'indépendance, mais il faut pourtant un mécanisme pour punir les fautes. Encore une fois, notre droit dans ce domaine est bon et arrive à faire l'équilibre entre ces besoins. Et encore une fois, le problème est qu'il n'est pas appliqué. Pourquoi? D'abord par corporatisme: les juges se serrent les coudes. Mais aussi et surtout parce que la profession judiciaire, qui autrefois refusait par discipline et sens du devoir de se syndicaliser, est maintenant noyautée par des syndicats de gauche. Et si les gesticulations de syndicats de gauche dans le domaine des transports ou de l'électricité peuvent être irritantes, leur travail de sape lorsqu'il s'agit d'apporter de la justice à la Justice est tout bonnement dégueulasse.

Donc, interdisons les syndicats de magistrats. Ca peut faire bondir, mais songeons que les syndicats sont déjà interdits dans le corps préfectoral et dans l'armée, parce que l'on considère avec raison que dans les services publics les plus essentiels de l'État le devoir du service de l'intérêt général est plus fort que le droit à la revendication. Je trouve que les juges sont aussi essentiels que les préfets, la justice aussi essentielle que la police, et que la règle qui permet l'efficacité des uns devrait s'appliquer aux autres.

A chaque fois que l'on veut sanctionner une faute d'un magistrat, aussi grave puisse-t-elle être, les syndicats se lèvent et font un esclandre. Le magistrat fautif est muté, et on n'en parle plus. Assez! Laissons les juges se faire justice. Laissons le Conseil supérieur de la magistrature faire son travail.

Bref, voilà quelques pistes de réforme qui, à mon avis, s'attaquent plus au noyau du problème, les hommes, les habitudes, les esprits, au lieu de vouloir recuisiner notre droit qui, finalement, n'est pas si mal que ça.

« On a écarté ce qui était mou de la bite »

Bon article et excellent podcast de Libération sur le dernier Charlie qui, pour une fois, ne fait pas son beurre sur le dos des cathos mais sur celui des musulmans.


07 février 2006

Les propos scandaleux d'un ministre

Je vous prie tout d'abord de me pardonner ces quelques jours de hiatus dans la publication de NN...

Et de me laisser pousser un petit coup de gueule contre un ministre qui s'humilie en usant de propos scandaleux. Nicolas Sarkozy, le ministre de l'intérieur? Non, Azouz Begag, ministre délégué à l'égalité des chances, aujourd'hui sur LCI.

J'en ai marre de ces ministres-mobylettes, sans vrais ministères, qui ne servent qu'à faire joli. Et celui-ci est particulièrement énervant, porte-flingue de Dominique de Villepin, à tirer au juger et sur ordre sur Nicolas Sarkozy, ce coup-ci sur son projet de loi sur l'immigration, qualifié notamment d'« injuste », terme très fort.

Un des grands principes du système républicain est ce qu'on appelle solidarité gouvernementale, autrement dit la notion (dût-elle être fictive) que le Gouvernement est un seul corps avec une seule action. Même du temps de la IVème République, où des ministres ennemis passaient leur temps à se glisser des peaux de bananes sous les pieds au lieu de diriger le pays, ils gardaient cette façade d'unité.

Sur ordre du premier ministre, M. Begag foule ce principe aux pieds et s'amuse à critiquer ouvertement un membre de son Gouvernement, un projet de loi défendu par son Gouvernement. Comme le dit de manière désabusée Luc Ferry, ministre de l'éducation nationale de Jean-Pierre Raffarin, s'il avait dit le quart de la moitié de ce que déclara péremptoirement M. Begag, il aurait été démissionné dans l'heure, et avec raison.

Un ministre, ça ferme sa gueule ou sa démissionne, avait déclaré Jean-Pierre Chevènement avant de démissionner (la première ou la deuxième fois?). Et M. Begag l'a trop grande. D'ailleurs il ne sert à rien, comme tout bon ministre-mobylette. Il le dit lui-même : il est, comme trop souvent, « l'Arabe qui cache la forêt ». S'il n'est qu'un paravent, comme il le déclare lui même, la seule chose honorable à faire est justement de démissionner!

Eh bien non. C'est trop rigolo d'être ministre-mobylette, on se balade de salons dorés en plateaux de télé. Ministre-saltimbanque.

01 février 2006

Quelques liens...

Les blogs ne sont pas seulement des journaux publics, mais des éléments de ce qu'on désigne par le terme barbare de « blogosphère », phénomène dû au fait que les blogs comportent des liens les uns vers les autres, sont connus en fonction de leurs relations les uns aux autres, et interagissent les uns avec les autres.

C'est pourquoi je vous signale une série de blogs que je lis et qui pourraient vous intéresser. Pour la plupart je connais leurs créateurs.
N'hésitez pas à m'en signaler d'autres.

(Oui, je sais que DSK a un blog.)