Nihil Nove

31 mars 2006

M. le Premier ministre: chargez!

Dominique de Villepin, le premier ministre, est en grande difficulté politique à cause de son Contrat première embauche, qui est refusé par la population pour toute une série de raisons: actions de guerilla de la part de la gauche et de l'extrême gauche, désinformation médiatique, etc.

On lui reproche de ne pas avoir parlé avec les partenaires sociaux, alors qu'il est de notoriété publique que lesdits « partenaires sociaux » se comportent beaucoup plus comme des adversaires autistes, et que le seul effet d'une négociation avec les syndicats aurait été de perdre quatre mois, alors que chaque jour jusqu'aux élections de 2007 est précieux. Alors que ledits syndicats sont à peu près aussi représentatifs qu'un comité du Parti communiste en Roumanie dans les années 1950 et que, composés de vieux fonctionnaires employés à vie, ils sont les moins aptes du pays à parler de la précarité des jeunes.

On lui reproche d'avoir utilisé l'article 49 alinéa 3, alors que pendant la lecture du projet de loi les députés socialistes s'étaient livrés à un travail de sape et de guérilla législative que rien ne justifiait, obstruction contre laquelle le 49-3 est la seule arme légitime et démocratique. J'étais à l'Assemblée pendant la lecture du projet, je peux en témoigner.

On lui reproche la suppression de la motivation du licenciement, alors que les licenciements en France sont les plus judiciarisés du monde développé, et que les prud'hommes, qui ont des dents contre l'entreprise et sont politisés jusqu'au bout des engles, donnent presque toujours raison aux employés, quelques soient les faits.

On lui reproche la période d'essai de deux ans alors même que l'absence de flexibilité est une des raisons de notre taux de chômage, et que les employés des pays européens qui ont inséré de la flexibilité dans leurs marchés du travail ne vivent pas dans la précarité, bien au contraire.

Ces choses-là, personne ne le dit, et surtout pas M. de Villepin. On pouvait le comprendre alors qu'il naviguait sur la vague du consensus. Mais aujourd'hui, alors que la rue se soulève contre le premier ministre, il n'a plus de raison de ne pas le dire.

Voici ma proposition à M. de Villepin: qu'il se rende au journal télévisé de TF1, et qu'il dise ces choses que tout le monde sait, mais que les hommes politiques refusent de dire. Sinon par honnêteté, du moins par calcul politique. La gauche serait scandalisée, mais elle l'est déjà. Le centre serait choqué, mais M. de Villepin a déjà perdu son électorat centriste. Par contre, la droite, elle, serait galvanisée d'un coup!

C'est ce qu'elle attend depuis trente ans: quelqu'un qui leur dise ce qu'ils savent mais n'osent pas dire. C'est ce qui a fait la popularité de Nicolas Sarkozy, le ministre de l'Intérieur. Le coeur frustré de la droite est à qui voudra le prendre. Qu'il assume fortement un discours libéral et réformateur, et la droite, qui se dérobe plus ou moins, se rangera tout d'un coup derrière lui comme un régiment compact, prêt à en découdre.

Le CPE passera, on en signera, et ce sera un succès d'ici la fin de l'année. Et pour 2007? En France, la droite perd non pas parce qu'il y a plus de gauche, mais parce que les électeurs de droite s'abstiennent, déçus. Si on leur donne un discours costaud, assumé, ils se déplaceront en masse pour faire gagner leur candidat et leurs députés. Voilà quelle doit être la stratégie de M. de Villepin.

De toute manière, il n'a plus rien à perdre.

22 mars 2006

C'est à peu près ça, en fait



Ahh, les Guignols...

L'éducation, l'éducation, l'éducation

S'il y avait autant de polytechniciens par rapport au nombre d'étudiants aujourd'hui qu'au début du siècle, il y en aurait 50 000 au lieu de 400.
Je ne suis pas fan, loin de là, mais Alain Minc déclare trouver ce chiffre « fascinant », et je suis d'accord. Le problème de la France, comme de tous les pays en déclin (ça y est! j'ai dit le mot!), c'est un problème de renouvellement des élites. Alors, comment réparer l'ascenseur social?

Vaste programme!

19 mars 2006

Colloque Olivaint

Hier, colloque annuel de la Conférence Olivaint dont j'ai l'honneur d'être membre, qui recevait des hommes politiques (Daniel Vaillant, député-maire du XVIIIème arrdt et ancien ministre de l'Intérieur, Eric Raoult, député-maire du Raincy et ancien ministre de l'Intégration), des experts (Amar Dib, membre de la Halde) et d'autres personnalités (Ghaleb Bencheikh, président de la Conférence mondiale des religionx pour la paix, S.E. Jean Guéguinou, ambassadeur de la France auprès de l'Unesco) sur le thème de la mixité sociale et de l'intégration.

Interventions toutes plus intéressantes les unes que les autres, mais celle qui m'a le plus marqué fut celles de Jean-Louis Bourlanges, député européen (et ancien président de la Conférence), qui a (entr'autres!) posé la question des racines du projet européen.

Ces racines sont-elles à trouver dans notre passé gréco-latin et judéo-chrétien, auquel cas le projet doit se limiter aux frontières des pays qui ont ces racines en commun? Ou bien, ces racines sont-elles dans les idéaux universels de démocratie et de droits de l'homme qui sont nées de ce passé, auquel cas l'Union n'est plus qu'une version plus avancée de l'ONU, qui doit remplacer le concept de frontière par celui d'horizon, qui recule au fur et à mesure qu'on avance, et accepter tout pays compatible avec ces idéaux? Je pense qu'il n'y a pas de mystère sur mes réponses à ces questions...

Colloque très fructueux en questions laissées volontairement ouvertes, en interrogations fécondes pour l'avenir.

17 mars 2006

Joyeux anniversaire

Il y a vingt ans, le 16 mars 1986, commencait la première cohabitation, Jacques Chirac étant nommé premier ministre et formant son deuxième gouvernement.

Cet anniversaire, c'est avant tout l'anniversaire de la lâcheté. Dans la Vème République, le président est responsable devant le peuple qui l'a élu. Un président qui refuse de démissionner après une élection législative dont les résultats le désavouent se rend coupable de fraude à la Constitution, qui est une forme de haute trahison, et tombe donc sous le coup de l'art. 68, celui de la responsabilité devant la Haute cour de justice.

C'est parce que M. Chirac n'a pas eu le courage de traduire François Mitterrand devant la Haute cour que, au lieu de la responsabilité présidentielle, c'est la cohabitation qui est entrée dans nos moeurs.

A l'heure où cette malédiction des gouvernements réformateurs de France, les manifestations et les grèves, nous assaille, que le premier ministre se souvienne du mal que la lâcheté de nos gouvernants a fait à notre pays.

15 mars 2006

J'adore les médias

Pour iTélé, il n'y eut aucun vainqueur du fameux débat Berlusconi/Prodi. Pour LCI, Prodi, très confiant, a battu son adversaire.

Heureusement qu'iTélé est de gauche et LCI de droite...

07 mars 2006

Hommage à François Mitterrand

Remise de médaille au siège du Parti socialiste...

Plateforme pour la réforme

Je serai ce soir à la Mutualité pour écouter les Réformateurs de l'UMP présenter leur « Plateforme pour la Réforme ». J'écouterai avec attention ce qui s'y passe car la réforme est un sujet extrêmement important pour l'avenir.

Ce mot de réforme est un de ces mots-clés qu'on entend trop souvent, mais pour celui-là ça ne me gêne pas, car la réforme est exactement ce dont on a besoin. Un premier ministre britannique dont le nom m'échappe avait déclaré qu'en France rien ne change jusqu'à ce que tout change.

Le poids de notre État sera-t-il à la Vème République ce que l'Algérie a été à la IVème et les privilèges à l'Ancien régime?

En France, les révolutions et changements de régimes se font sur deux types de sujets: les guerres, et l'argent. Avec notre dette qui explose et les baby boomers qui prennent leur retraite, si on ne réduit pas le poids fiscal et financier de l'État, notre pays se dirige, à plus ou moins long terme, vers la banqueroute.

Je n'arrête pas de réclamer une nouvelle ambition pour la politique, par dessus l'économie, mais le problème est qu'alors que la majorité des fonds de l'État passe en frais de fonctionnement, que les fonctionnaires sont plus puissants que les ministres pourtant investis constitutionnellement pour les diriger, il est impossible d'avoir une politique ambitieuse sans d'abord réformer l'État.

Bref, la prochaine législature sera réformatrice ou ne sera pas.

06 mars 2006

Une Déclaration des droits du contribuable

Notre dette nous pend au nez. Pourquoi ?

Prenons quelques chiffres : de 1986 à 1988, le Gouvernement a réduit le déficit de moitié. De 1993 à 1997, les gouvernements l’ont réduit d’un tiers. Depuis 2002, il ne l’a pas réduit. On constate donc l’incapacité de nos gouvernants depuis vingt ans à réduire la dette par eux-mêmes.

La raison est simple : électoralement parlant, c’est beaucoup plus payant d’hypothéquer l’avenir pour s’assurer du présent. Nos gouvernants sont donc naturellement incités à gérer l’État de manière irresponsable.

Je propose donc de faire une importation des États-Unis : la Taxpayer’s Bill of Rights, ou Déclaration des droits du contribuable. De nombreux États américains ont adopté ce dispositif. Les modalités de cette innovation varient, mais l’idée reste globalement la même : placer des cadres constitutionnels sur la capacité d’un État de lever des impôts, et donc sur sa capacité de nuisance économique.

La plupart du temps, cela inclut une interdiction des déficits, et l’accrochage du taux annuel d’augmentation des impôts à un ou plusieurs critères objectifs : au Colorado, toute augmentation d’impôt doit être inférieure à l’augmentation de la population. La déclaration prévoit aussi ce qu’on doit faire en cas d’excédents, et là encore les solutions varient : les rendre au peuple sous forme de rabais d’impôts, les investir dans un Fonds « pour les jours de pluie », ou dans des domaines précis de l’action gouvernementale comme l’éducation.

La plupart des gens à qui j’ai évoqué cette hypothèse, même les plus libéraux, ont été choqués. Placer ainsi des limites draconiennes sur la capacité d’action des gouvernants, interdire toute politique fiscale, c’est anti démocratique ! On n’y songe pas !

Pourtant, l’apport principal du libéralisme à la pensée mondiale, n’est-elle pas justement cette idée, qu’on a appelé checks and balances ou encore État de droit, la conviction aussi géniale qu’absurde qu’il faut placer des limites juridiques à l’exercice du pouvoir ?

Il est aujourd’hui universellement admis qu’il ne saurait y avoir de démocratie sans la protection par la Constitution des libertés politiques des citoyens. Pourquoi donc ne pas protéger également leurs libertés économiques ? Est-il si choquant, dès lors qu’on considère que le droit de propriété est sacré et inaliénable, que l’on considère également que la première limite à ce droit, le pouvoir de l’État de lever l’impôt, doit être strictement encadrée par la Constitution ?

Prenons un parallèle : dans les années 1980 et 1990, devant les politiques monétaires électoralistes des gouvernants, de plus en plus de voix s’élevèrent dans les pays occidentaux pour réclamer l’indépendance des banques centrales. Quelle atteinte à un pouvoir régalien, celui de battre monnaie ! Pourtant, peu à peu, les banques centrales sont devenues indépendantes, et il est aujourd’hui reconnu que la banque centrale d’un État moderne doit être indépendante des tribulations politiques du moment, et que cette restriction est une avancée de l’État de droit.

Je postule qu’il en sera de même dans le domaine fiscal avec les déclarations des droits des contribuables que dans le domaine monétaire avec l’indépendance des banques centrales : ce ne sera bientôt plus une proposition radicale mais au contraire un attribut normal et nécessaire d’une gouvernance moderne.

Je propose donc que, pour une fois, la France ne soit pas la dernière en Europe à adopter une innovation mais, au contraire, qu’elle mène le bal et soit dans le camp de la modernité audacieuse plutôt que du conservatisme frileux. Elle en a d’autant plus besoin qu’une dette aussi abyssale que la nôtre appelle des solutions radicales. Insérons donc une Déclaration des droits de l’homme et du contribuable dans notre Constitution !

Quelles modalités envisager pour cette Déclaration ?

Premièrement, interdiction absolue des déficits. Avec la dette qu'on a, c'est une nécessité.

Deuxièmement, la fixation du taux de l’impôt à des critères objectifs. Les critères à choisir sont ici essentiels. Dans certains États, ces critères sont tellement flexibles que c’est comme s’il n’y en avait pas. Dans d’autres, ils sont trop rigides, ce qui pousse à des absurdités. C’est là qu’il faut miser sur le talent des juristes et des économistes. Ça fait tellement longtemps qu’on n’en a pas vu qu’on a oublié à quel point un texte, s’il est mûrement pensé et bien rédigé, peut être efficace.

Troisièmement, limitation du nombre d’impôts : un seul impôt sur le revenu, avec deux tranches maximum, un seul impôt sur les entreprises, un seul impôt sur la valeur ajoutée, un seul impôt sur le patrimoine. On a plus de cent impôts à l’heure actuelle : c’est ridicule.

Quatrièmement, enfin, et c’est ça qui, je l’espère, fera le sel de ma proposition : toutes les exceptions à la Déclaration sont possibles. Le seul hic est qu’il faut qu’elles soient adoptées par référendum.

Par exemple, même si ma Déclaration avait fait partie de la Constitution américaine, une politique volontariste comme le New Deal aurait été possible, car les impôts supplémentaires et les déficits qu’elle occasionna auraient été approuvés par le peuple américain. En cas de guerre ou de catastrophe nationale, le peuple acquiescera nécessairement du besoin d’ajustements fiscaux ; sinon, c’est que la catastrophe ne doit pas être si grave.

La flexibilité de la politique fiscale existe toujours, mais il faut que le peuple l’approuve. Et en fait, à travers la politique fiscale, c’est la politique tout court qu’une telle Déclaration rendrait au peuple. Tout comme les parlements se sont emparés du pouvoir en commençant par les impôts, une vraie démocratie directe et participative, telle que la vie moderne le permet enfin, serait rendue possible en rendant la politique fiscale à ceux qu’elle concerne au premier chef : les citoyens.

En tapant dans leur portefeuille, on intéressera (dans les deux sens) les gens à la manière dont leur État est géré, donc à la politique, et on ramènera donc la Cité là où elle doit être : sur le Forum, pas dans le Capitole.

03 mars 2006

Amalgame

J'ai lu l'autre jour dans un grand magazine une phrase du style: comment justifier l'aide américaine au programme nucléaire de l'Inde, qui n'est pas signataire du Traité de non-prolifération, alors qu'ils sont si fermes contre l'Iran?

Euh...

Parce qu'un des deux pays est la plus grande démocratie du monde et que l'autre a un chef de l'État qui veut rayer Israël de la carte? Ca joue quand même un peu, non?

Non?

Bon.

2007!

Puisque c'est la mode, j'ai bien envie de me présenter aux présidentielles en 2007, au moins aux primaires de l'UMP.

Pourquoi pas? J'aurais l'air d'un con, mais ça fait longtemps que je sais que le ridicule ne tue pas. Légalement, je ne peux pas me présenter à cause de la limite d'âge, mais de toute manière je n'aurais pas pu avoir les signatures ou payer la caution, alors... Je suis encore très jeune, mais de nos jours ça peut être une force.

L'idée serait de faire un livre et une campagne médiatique, pour faire entrer mes idées dans l'esprit du temps. J'ai des propositions bonnes et originales à faire, ça pourrait contribuer au débat de manière utile. Et puis j'aurais quelque chose à faire.

Qu'en pensez-vous?

Christophe Barbier

Je vous engage à lire le « Journal de la présidentielle », le blog de Christophe Barbier, chef du service politique de L'Express et co-chroniqueur d'une de mes émissions de politique préférées, « Ca se dispute ». J'ai notamment découvert qu'il est normalien, ce que je n'aurais pas deviné, ce qui veut dire qu'il n'étale pas sa culture (contrairement à moi), ce qui est une preuve de noblesse.

Série de brèves très intéressantes et pertinentes, où il n'hésite pas à balancer, même si je souhaiterais que les billets commencent par autre chose que: « Coup de fil de/entrevue avec Nicolas Sarkozy/Dominique Strauss-Kahn/et al. qui me fait penser que... »

Viendez lancer des entreprises!

J'ai regardé l'index de liberté économique de la Heritage Foundation, un groupe de réflexion américain plutôt conservateur. La France est au rang 44. La Grande-Bretagne au rang 4.

No comment.

01 mars 2006

Réforme de l'État

J'ai écouté avec attention ce matin le député Georges Tron, que j'ai rencontré à la Fondation Concorde, évoquer le thème de la réforme de l'État et dire ce que l'on sait tous déjà: il y a trop de fonctionnaires, qui ne travaillent pas assez.

Près de 45% du budget de l'État chaque année passe dans les frais de fonctionnement. Bien sûr, certains fonctionnaires sont exemplaires, mais pourquoi la France a-t-elle (exemple parmi d'autres) deux fois plus de policiers que la Grande-Bretagne pour une population équivalente? Tout simplement parce que (en moyenne, bien sûr: certains policiers, j'en connais, travaillent avec autant de noblesse que d'acharnement sur le terrain), ils travaillent deux fois moins.

Le travail de M. Tron à la Commission des finances de l'Assemblée en tant que rapporteur spécial, notamment sur la fonction publique, est à ce titre exemplaire. Il a expliqué notamment que dans les pays qui ont réussi à réformer leur fonction publique (Canada, Suède, Nouvelle-Zélande...), cette réforme c'est faite en quelques années seulement, et qu'en France elle ne pourra se faire qu'avec une dose impressionnante de courage politique.

Nous avons à ce titre une possibilité inédite, avec des départs à la retraite massifs de 2006 à 2010, qu'il faut impérativement renouveler le moins possible. Nous avons de la chance: cette opportunité démographique correspond à une opportunité politique, les élections de 2007. Cette fenêtre de tir qui ne se représentera plus, il faut à tout prix s'en emparer. Celui (ou celle!) qui remportera les élections aura trois ans pour réformer l'État, ou condamner les finances de l'État à exploser à plus ou moins long terme.