Nihil Nove

13 juin 2005

Homo homini lupus

Alors que je me prépare à me rendre à l'autre bout de Paris pour satisfaire à mes obligations d'étudiant en cette période d'examens, en avalant un léger déjeûner et en lisant, me voilà pris d'une soudaine envie de suspendre le cours de ma vie pour contempler ce monde si étrange où nous essayons de tracer les trajectoires de nos existences .

Dans autant d'onglets de mon navigateur, je lis en parralèle un extrait de Under the Loving Care of the Fatherly Leader, un nouveau livre censé être le premier et le seul portrait exhaustif de l'histoire, la politique, les moeurs, etc. de la Corée du Nord, et un article de Benoît XVI, alors préfet de la Congrégation pour la doctrine de la foi, commémorant le débarquement en Normandie . Devant moi, voilà des couleurs qui représentent l'infini spectre des possibilités humaines . L'homme est capable de tout . Je refuse de trancher la dispute entre Hobbes et Rousseau, pour savoir si l'homme fondamentalement bon où s'il est un loup pour lui-même . Tout ce que je sais, c'est qu'il est capable de tout, des extrêmes les plus abjects de l'horreur, dont les régimes communistes restent l'exemple plus abouti, au don de soi dans l'amour le plus absolu, dont l'Église a donné et continue de donner les meilleurs exemples . L'homme est tellement capable de tout qu'il est loin d'être consacré à l'extrêmisme : nous sommes également capables de la médiocrité la plus fade . Et toutes les variations entre ces extrêmes et ce centre sont possibles : l'homme vraiment peut tout .

Avec moins d'éloquence, je rejoins ici Pascal et j'aimerais finir ce raisonnement avec lui, faisant valoir que les infinies possibilités de l'homme n'ont d'égal que ses limites les plus triviales . Quel mystère que nous sommes ! Quel paradoxe ! De là à résoudre ce paradoxe en cherchant refuge dans la Personne d'un dieu qui serait infini et inconnaissable, mais qui aurait voulu se faire homme et se révéler à nous...

Quoi qu'il en soit, c'est cette foi en l'infini potentiel de l'homme qui nous manque, dans notre France qui a arrêté de s'aimer, et qui a peur de son ombre : chômage, précarité, insécurité, masse jaune de chinois soudain éveillés avec leurs soutien-gorges au rabais, autant de spectres qu'on nous agite sous le nez et qui font leur effet ! Le malaise institutionnel et social de notre République est le résultat d'un état d'esprit, de cette peur et de cette résignation . Il ferait bon que nous retrouvions cette foi en l'homme, en sa capacité à faire, en sa liberté, en ses titanesques capacités . L'avenir de nos institutions en dépend .