Nihil Nove

09 janvier 2006

Priez pour Sharon

Ariel Sharon, premier ministre israélien, sort péniblement de son coma après une grave attaque cérébrale qui, selon toute vraissemblance, laissera trop de séquelles pour qu'il exerce à nouveau le pouvoir. (Libération, Le Figaro)

Cet homme aura été la meilleure chance d'Israël depuis bien longtemps. Héro de guerre et un des plus grands généraux du XXème siècle, il aura refondé la politique intérieure d'Israël sur des bases saines, par deux fois, en imposant des partis larges et rassembleurs sur la scène si fragmentée des élections israéliennes, d'abord le Likoud dans les années 70 puis, après l'anémie de ceux-ci, Kadima en 2005. Bref, un lion.

Et bien sûr, surtout, sa grande oeuvre aura été la politique de retrait unilatéral, qualifiée partout de ce mot aimé des journalistes, pragmatique. Elle est surtout la première véritable chance de paix au Moyen-Orient, car elle laisse toutes les cartes à un Israël qui voudrait d'un État palestinien, mais d'un État palestinien sous contrôle israélien, donc (n'en déplaise à Leila Chahid) un État palestinien plus sûr pour tout le monde.

Malgré la chute de son chef, fondateur et père, Kadima continue à grimper dans les sondages. Mais sera-t-il abattu par les luttes intestines pour le pouvoir? Ehud Olmert, ancien maire de Jerusalem et premier ministre par intérim, a les capacités, mais il est peu populaire, notamment à cause de scandales de corruption lié à des emplois fictifs dans sa ville (comme quoi, l'histoire ne se répète jamais mais elle rime parfois, comme disait l'autre). Tzipi Livni, le ministre de la justice, me plaît bien parce qu'apparemment elle est issue de l'aile conservatrice du Likoud, et que c'est une femme de poigne, mais elle a peu de poids politique. Shimon Peres, ancien premier ministre et transfuge du parti travailliste après en avoir perdu la tête, a la légitimité d'homme d'État, mais la fâcheuse habitude de se perdre ses élections.

Quel que soit le vainqueur, s'il y en a un, aura-t-il l'envergure et le poids (au sens figuré) de M. Sharon? Malheureusement pour Israël et le Moyen-Orient, c'est douteux.

Je ne suis pas médecin, et de toute manière les informations qui filtrent sur l'état de M. Sharon sont très parcellaires, mais j'espère, peut être contre toute raison, que M. Sharon, à l'image d'un Jean-Paul II, même diminué, même paralysé, même ne pouvant plus parler, poussera la volonté invincible qui l'a toujours amené à la victoire au long de sa vie à garder la barre de son pays, et à maintenir ses responsabilités.

En tous les cas, je prie pour lui.